On ne choisit pas sa classe sociale à la naissance. On tombe dedans et toute notre vie, on s’attelle à atteindre la classe supérieure (l'herbe plus verte?) ou à se maintenir en statut quo. Surtout ne pas redescendre l'échelle.
Je suis née pauvre. Du moins j'ai grandi avec ma grand-mère pauvre et courageuse (merci Mémé). On vivait dans une maison en planches bringuebalante. Une maison à la merci des éléments naturels. Je me rappelle encore de ces nuits de Mars (pendant la saison des pluies torrentielles) où l'on me réveillait en catastrophe parce que le niveau d'eau d'inondation était monté. Nuit sans sommeil, tenir jusqu'au matin sur un matelas mouillé.
Ma grand-mère nous a toujours inculqué la notion de combativité, ne jamais baisser les bras et se morfondre dans la misère. Ne pas avoir honte de notre statut social si on fait tout pour gagner honnêtement notre pain quotidien. Je me rappelle de ma grand-mère en train d'étudier à la lueur de la lampe-tempête pour passer le concours d'infirmière. Elle voulait grimper dans l'échelon de la fonction publique pour gagner plus et relâcher le noeud de ceinture des fins de mois serrées. Lors de mon départ pour la France, elle m'a dit: "Majo, fais tes études, réussis pour avoir une chance de t'en sortir."
Je suis née pauvre. Mais quand on est enfant, on ne peut pas vraiment mesurer le tracas des adultes qui doivent réfléchir tous les matins: "Comment faire aujourd'hui?"
Quand on est enfant, on se contente de vivre nos journées bien remplies: se doucher, manger, aller à l'école, se doucher, manger, rire aux éclats.
Quand on est enfant, quand on naît pauvre, tout ce que nous avons est le jeu. Un moyen d'échapper au quotidien. Un moyen de sublimer un peu.
Enfant, j'avais 3 amis, des voisins riches. Ils vivaient de l'autre côté de la barrière blanche. De l'autre côté... Nous voyions bien que nous appartenions à 2 mondes différents. Mais à 8 ans, ça n'a pas beaucoup d'importance. Tout ce qu'on partage est le jeu. Jouons!
Puis nous avons grandi et un fossé s'est creusé juste devant la barrière blanche, séparant nos 2 mondes figés. Nous vivons aujourd'hui à Paris mais nous ne nous fréquentons pas. Pour tout dire, ils m'évitent. Mes relances "hey! Et si on prenait un café ensemble? Tiens prends mon numéro et fais-moi signe quand tu es dispo" sont restées lettres mortes. Le silence malgré ce Facebook supposé nous connecter.
J'ai donc accepté la situation. C'est comme ça, c'est la vie.
Mais aujourd'hui encore, je me surprends à penser à notre enfance.
J'aimerais refaire un saut dans le passé quand ils venaient jouer dans ma bicoque à faire les ninjas, jouer à cache-cache, faire des acrobaties dans les plants de bananiers de ma grand-mère (qui nous passait un sacré savon quand elle découvrait le carnage).
J'aimerais revivre ces moments où j'allais chez eux pour faire du vélo, me rouler dans le gazon bien tondu durant les parties de football Américain ou faire des tournois de "Mortal Kombat" sur Super Nintendo.
J'aimerais refaire un saut dans le passé, savourer nos moments d'innocence, d'insouciance, de naïveté lorsque nous pensions encore que nous serions amis pour toujours.
L.
<3
RépondreSupprimerMerci
SupprimerUn magnifique texte, rempli de belles emotions. L'enfance a cette qualite particuliere, de ne pas faire la difference, cette simplicite. C'est dommage de la perdre au fil du temps, nous avons tous tant a apprendre les uns des autres.
RépondreSupprimerMalheureusement notre conscience finit par naître à la vérité et les fossés se creusent. Dans mon monde idéal, ces considerations materielles ne peseraient pas dans la balance au regard des relations humaines. Naïveté me dira-t-on.
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